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Hommes, techniques et savoir-faire

Derrière les grandes possibilités offertes par le verre se cachent des savoir-faire, des techniques mais aussi des outils, des fours et des machines qui n’ont cessé d’évoluer au fil des siècles. Les verreries ont employé des hommes, mais aussi des femmes et des enfants au sein d’ateliers connexes au travail du verre : la taillerie, le coupage, la poterie, la forge, l’emballage sont indispensables au bon fonctionnement de cette industrie. De même, la production nécessite bien souvent en amont des dessins de conception, qu’ils soient artistiques ou industriels, et en aval un travail de promotion du produit fini pour sa commercialisation. L’industrie du verre a été fortement impactée par les mutations technologiques et les changements dans les modes de consommation. Avec l’arrivée des matières plastiques, de nombreuses verreries ferment leurs portes dans les années 1970. Le changement climatique et les approches plus globales, prenant en compte le cycle de vie des objets, pourraient toutefois remettre le verre sur le devant de la scène.

Le changement climatique et la prise de conscience écologique pourraient remettre le verre sur le devant de la scène.

AVANT/APRÈS

Si le dessin artistique transcrit la sensibilité unique et personnelle de l’artiste, un nouveau mode de représentation s’impose avec l’avènement de la révolution industrielle. Le dessin technique moderne, élaboré en 1799 par Gaspard Monge à partir de ses travaux sur la géométrie descriptive,traduit la pensée technique dans un langage normalisé — dimensions, forme exacte — en vue de la fabrication de l’objet.

 

À l’autre bout de la chaîne de production, l’objet est habillé, conditionné, sublimé. Dans un monde structuré par les échanges commerciaux, le concept d’image de marque se développe. La forme de l’amphore renseigne déjà précisément sur sa provenance et son contenu. Apparue à la fin du XVIIIe siècle, l’étiquette habille progressivement les flacons et s’orne de motifs floraux en écho aux fragrances du précieux liquide. Au début du XXe siècle, François Coty en s’associant avec le grand maître-verrier, René Lalique, introduit une nouvelle dimension esthétique au flaconnage. À l’image de cette révolution commerciale, le flacon Le Narcisse Bleu devient l’emblème de la marque Mury, traité comme un bijou dans un écrin luxueux. Le flacon sublimé est reconnaissable parmi tant d’autres. Peu à peu l’étiquette disparaît remplacée par la technique de la sérigraphie, plus discrète.

FÉMININ/MASCULIN

Le travail du verre s’inscrit dans une longue tradition où les hommes occupent une place de choix. Les postes à proximité du four, les mieux rémunérés en raison de leur dangerosité et de leur technicité, leurs sont majoritairement réservés : souffleur de verre, gazier, compositeur ou encore chauffeur de four. D’autres postes masculins dédiés à l’entretien sont également indispensables au bon fonctionnement de la verrerie comme le manœuvre, l’électricien, le maçon, le potier et le chauffeur pour la livraison de la marchandise.

Les femmes, souvent passées sous silence dans le monde des verreries, n’en sont pas pour autant absentes. Occupant jusqu’à un tiers des effectifs dans les verreries de Fourmies et de Trélon au cours de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, elles sont principalement assujetties aux postes connexes organisés au sein de différents ateliers comme l’atelier de parachèvement, la taillerie ou encore l’emballage — des métiers à plus faible salaire.

 

L’atelier de parachèvement dispose alors de postes bien définis, remplacés progressivement par des machines : la traceuse à la main au diamant, la décaloteuse, la fletteuse qui supprime les irrégularités du verre après décalottage, la rebrûleuse qui arrondit les bords d’une pièce, la laveuse, l’essuyeuse et enfin la releveuse qui inspecte les défauts de l’objet. Chaque mauvaise pièce est placée au rebut et déduite de la production du verrier — une source de nombreux conflits.

 

L’atelier de taillerie est dirigé par un chef de place, qui distribue le travail aux différents postes : la tailleuse à la roue d’émeri, la polisseuse, la laveuse, la releveuse et la metteuse en boîte. Toutes ces tâches répétitives nécessitent beaucoup d’attention et de dextérité dans un environnement sonore, sombre et parfois au contact de substances chimiques.